
Certaines pratiques sonores s’accompagnent de modifications de la perception du corps. Les ayant moi-même rencontrées à de nombreuses reprises, j’ai cherché à comprendre comment les neurosciences les abordent, sans pour autant les réduire à des phénomènes purement biologiques.
Pratiques sonores, perception corporelle et ce que les neurosciences peuvent en direLors de pratiques sonores immersives (bains sonores, voyages sonores, massages sonores) certaines personnes décrivent des sensations particulières : impression de flottement, de dilatation du corps, de décalage par rapport à leurs sensations habituelles, voire parfois le sentiment d’être « un peu à côté » de leur corps.
Dans certains courants spirituels ou énergétiques, ces expériences sont décrites à travers des notions comme le « corps éthérique » ou les « corps subtils ». Ces mots permettent souvent de
nommer un vécu réel, mais ils ne sont pas les seuls possibles.
Aujourd’hui, certaines recherches en neurosciences proposent également
des pistes de compréhension complémentaires, sans réduire l’expérience à un simple mécanisme biologique.
Ce que font concrètement les pratiques sonores à notre perceptionDans une séance sonore, plusieurs éléments se combinent :
• l’attention est dirigée vers l’écoute,
• les repères visuels sont souvent réduits (yeux fermés, lumière douce),
• le corps est immobile ou très peu sollicité,
• le son est continu, enveloppant, parfois vibratoire,
• certaines vibrations sont perçues à travers le corps (peau, os, tissus).
Or, notre sentiment d’être « dans notre corps » repose sur une
intégration constante de plusieurs informations sensorielles : vision, toucher, proprioception (perception de la position du corps), audition, mouvement.
Lorsque cet équilibre habituel est modifié — comme c’est le cas dans une pratique sonore immersive — le cerveau peut
réorganiser temporairement la manière dont il construit le schéma corporel.
Cela peut se traduire par des sensations nouvelles, parfois déroutantes, souvent décrites comme profondément relaxantes ou expansives.
Une zone du cerveau souvent impliquée : la jonction temporo-pariétaleLes neurosciences s’intéressent depuis plusieurs décennies à une région du cerveau appelée
jonction temporo-pariétale, située à la croisée des lobes temporal et pariétal.
Cette zone joue un rôle central dans :
• l’intégration des informations sensorielles,
• la perception du corps dans l’espace,
• le sentiment d’unité corporelle,
• la distinction entre soi et l’environnement.
Des études cliniques et expérimentales ont montré que
des perturbations de cette région (notamment au niveau du gyrus angulaire, surtout à droite) peuvent être associées à des expériences de dépersonnalisation, de dissociation corporelle ou de sorties hors du corps, notamment chez certaines personnes épileptiques ou dans des contextes expérimentaux précis.
Il est important de souligner que ces recherches décrivent
des corrélations observées, et non des causes définitives. La science ne permet pas aujourd’hui de dire si l’activité cérébrale est à l’origine de l’expérience, si elle en est la conséquence, ou si les deux s’influencent mutuellement.
Une lecture incarnée, sans réduction ni dogmeCes données n’ont pas vocation à invalider les vécus subjectifs, ni à trancher des questions métaphysiques.
Elles offrent simplement un
cadre de compréhension incarné, permettant de dire :
certaines pratiques modifient les conditions de la perception,
et ces modifications peuvent s’accompagner d’expériences inhabituelles du corps et de la présence.Dans les pratiques sonores, le son n’est donc pas seulement « agréable » ou « relaxant » : il agit comme un
modulateur de l’attention et de l’intégration sensorielle, ouvrant parfois des états de conscience plus larges ou plus subtils.
Nommer l’expérience, sans l’imposerLes mots que l’on choisit pour décrire ces vécus dépendent souvent de son histoire, de sa culture et de son cadre de référence.
Parler de « corps subtil », de « décalage perceptif » ou de « modification du schéma corporel » revient, au fond, à tenter de
mettre du langage sur une expérience intérieure.
L’essentiel reste peut-être ailleurs :
dans la qualité de l’écoute, dans la sécurité du cadre, et dans la capacité du praticien ou de la praticienne à
accompagner ces états sans les provoquer ni les interpréter hâtivement.
________________________________________
Sources et référencesNeurosciences et perception du corps
• Blanke, O. (2012).
Multisensory brain mechanisms of bodily self-consciousness. Nature Reviews Neuroscience. • Blanke, O., Ortigue, S., Landis, T., Seeck, M. (2002).
Stimulating illusory own-body perceptions. Nature. • Berthoz, A. (1997).
Le sens du mouvement. Odile Jacob.
États modifiés de conscience et approche critique
• Evrard R., Rabeyron, T. (2020).
Clinique des expériences exceptionnelles Dunod.
• Varela, F., Thompson, E., Rosch, E. (1993 / trad. fr. 2017).
L’inscription corporelle de l’esprit. Seuil.
© Jessica DA COSTA
reproduction intégrale interdite, tout extrait doit citer mon site www.theraneo.com/jessica-dacosta
Mots clés : sonothérapie, bain, sonore, voyage, sonore, sortie, hors, du, corps, voyage, astral, massage, sonore, soundhealing
cet article vous a intéressé ? découvrez ma prestation en rapport | |
Autres articles de cette rubrique | voir tous